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La lettre de Seungkwan
02 novembre 2024 - Vous trouvez ça normal ? Moi non. Je l'ai traduite en français.
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Tout le monde a entendu parler de la longue lettre de Seungkwan, des Seventeen ?
Pour aller à l'essentiel : une volumineuse « analyse» que le groupe HYBE aurait utilisée pour suivre les tendances du marché se serait retrouvée entre les mains des juges, en plein audit de HYBE devant l’Assemblée Nationale coréenne.
Etrange coïncidence que cet audit surprise au beau milieu de la fameuse bataille juridique HYBE / ADOR, non ? Mais j’en parlerai ailleurs.
On ne saura sans doute jamais clairement qui a commandité cette "analyse de marché", ni surtout comment HYBE comptait l’utiliser. Toujours est-il que le sujet prend une telle ampleur que je ne doute pas que toute l’industrie musicale coréenne sera bientôt prise à parti...
Disons seulement que, face aux propos extrêmement caustiques du torchon en question, HYBE se retrouve à devoir s’excuser auprès de chaque artiste incriminé...
En effet, dans le rapport - vite publié et tout aussi vite retiré de la publication, mais trop tard, évidemment - tout y passe, des jugements arbitraires pour manque de talent au dénigrement physique de nombreux artistes connus dans de nombreuses agences concurrentes, le tout assorti de croustillantes suggestions de manipulation du public… une bombe atomique dans le paysage K-Pop de cette fin octobre 2024, venant de la plus grosse agence du pays, HYBE, portée au pinacle ces dix dernières années pour avoir révolutionné le monde de la K-Pop par ses méthodes supposées plus humaines... A peu près tout le monde est sous le choc, de tous les côtés.
Il semblerait que les excuses de HYBE, qui s’emmêle les pinceaux à tenter d’expliquer l’objet de cette étude, ne pourront pas effacer aussi facilement les dégâts causés aux nombreux artistes.
Mais ce qui me surprend le plus, c’est cette lettre. Car cette fois, les idols eux-mêmes s’en mêlent… et ils le font bien.
Rappelons au passage que Seungkwan est membre du groupe Seventeen depuis plus de dix ans, que le groupe est détenu par l’agence Pledis, rachetée par HYBE il y a quelques années. Seventeen appartenant donc à HYBE, il a échappé aux critiques. Il est « du bon côté du manche » comme on dit. Sa position en est d’autant plus difficile…
Il existe plusieurs traductions en anglais, que j’ai croisées, et je me suis fait un plaisir de la traduire en français, juste parce qu’elle m’impressionne réellement :
Je n’en peux plus de voir les gens se blesser les uns les autres.
Devant tout ce qui est arrivé, jusqu’à aujourd’hui j’avais gardé mes sentiments pour moi, en pensant que tout finirait par passer, et continué à travailler dur, avec les autres membres du groupe, comme je l’ai toujours fait. Mais être simplement spectateur de ces événements et espérer que le feu finira bien par s’éteindre n’est plus possible. Je ne peux pas garder le silence plus longtemps, pour tous mes confrères qui travaillent dur en ce moment-même, pour mes fans, pour les membres de mon groupe, pour les miens qui sont blessés.
Certains vont penser que je ne devrais pas m’en mêler, d’autres que je parle trop vite, mais je le fais en rassemblant mon courage.
Etre une célébrité est le chemin que j’ai choisi, et même s’il a des aspects que je me dois d’endurer parce que je reçois beaucoup d’affection, je ne crois pas qu’on doive endurer ce travail et en être blessé jusqu’à la limite de se détruire.
Je veux seulement faire de mon mieux, me montrer responsable des tâches qui me sont confiées, rendre aux fans l’amour qu’ils me donnent, et partager, par tous les moyens dont je dispose, l’énergie positive que je peux leur offrir. Le fardeau peut être écrasant et la pression de la fatigue physique et mentale indescriptible.
Malgré cela, nous devons continuer, même aujourd’hui. Certains gèrent cela rationnellement, d’autres tentent de rester positifs. Certains, lorsque c’est difficile, s’adaptent et le supportent comme ils le peuvent, parce que c’est ce que nous avons choisi et nous nous devons de le supporter. Mais aujourd’hui, y trouver une justification est devenu particulièrement dur, et même cruel.
Certains jours sont ensoleillés et d’autres nuageux, et aujourd’hui est un jour très nuageux pour moi. Moi aussi, j’ai tenté de tout surmonter en restant positif. J’ai essayé de continuer à sourire quoi qu’il arrive. Mais aujourd’hui n’est pas un jour facile, car j’ai le cœur brisé pour tous ceux qui souffrent en ce moment. Je suis frustré de ne pas pouvoir aller les embrasser tous. Je ne sais pas si mes mots spontanés et maladroits parlent à quelqu’un, s’ils peuvent réconforter quelqu’un.
Les membres de notre groupe, mais aussi nos collègues et amis qui travaillent durs dans cette grande industrie de la K-Pop sont tous des gens qui aiment sincèrement ce qu’ils font.
Parce qu’ils sont profondément sincères, ils sont blessés, et parce qu’ils ont un grand cœur, ils se sentent parfois vidés, mais ils continuent de vivre, jour après jour, en donnant et en recevant de l’amour, pour eux-mêmes, pour leurs membres, leurs familles et leurs fans.
Ce que je veux dire, c’est qu’ils ne sont pas des personnes dont le travail ordinaire et paisible puisse être jugé et discuté à la légère. Ils ont tous souffert, ont été mis à terre parfois, et ont pris sur eux pour continuer malgré tout à montrer le meilleur d’eux-mêmes sur la scène, pour leurs fans. J’aimerais qu’on ne traite pas les idoles à la légère.
Vous ne pouvez pas vous permettre des commentaires aussi détachés sur ce que nous sommes. Je ne parle pas seulement de nous, mais aussi des autres artistes, nous ne sommes pas des objets. J’espère que vous ne pensez pas que vous pouvez disposer de nous comme il vous chante.
Une semaine de shows télévisés et de promotion suffit à nous vider physiquement de toute notre énergie. Mais nous devons aussi assurer les tournages publicitaires, les événements, les spectacles, et autres activités de nos emplois du temps. Malgré tout, ces jours-ci, beaucoup de mes confrères me saluent d’un sourire chaleureux, avant même que je ne le fasse. Quand cela arrive, je leur souris en retour. C’est tout ce que je peux faire pour eux.
Lorsqu’ils me saluent d’un grand sourire, je leur en suis reconnaissant. Certains jours une simple ligne de message écrite sur un album me redonne de la force quand je suis épuisé. Je voudrais seulement qu’ils ne souffrent pas et restent en bonne santé.
J’aime aussi les challenges de danse. Que nous nous connaissions bien ou pas, créer ensemble une vidéo pour un challenge, danser sur les chansons des autres, ailleurs que sur une scène, c’est toujours un beau moment, parce que nous sommes dans les plus belles années de notre jeunesse, et nous nous créons ensemble de petits souvenirs. Et c’est encore mieux si les fans prennent plaisir à les regarder. Même si nous ne nous connaissons pas, j’aime que nous puissions échanger un petit mot d’encouragement les uns pour les autres pour nos promotions respectives, « Fighting ! », dans ce petit moment un peu embarrassant qu’est la fin du tournage. Se rencontrer dans le respect et pouvoir s’aider, même un peu, a de l’importance et nous devons en être reconnaissants.
Je suis le premier à devoir faire un effort, mais je souhaiterais que nous puissions tous être un peu plus chaleureux. Si nous nous regardons avec bienveillance, et offrons notre soutien et notre affection, peut-être les choses pourront-elle s’améliorer. Je ne veux plus voir personne être brisé et finir par abandonner. J’espère sincèrement que nous pourrons arrêter de nous infliger des blessures de manière irresponsable. Mon vœu le plus sincère est de ne plus voir souffrir les membres de mon groupe, mes collègues qui travaillent tous si dur en ce moment, nos fans qui nous soutiennent, et le personnel dévoué qui travaille pour nous. Aux fans qui nous aiment chaleureusement même en ce moment, je veux vous dire que je vous aime et que je suis désolé.
Des déclarations comme celles-ci, il n’y en a pas eu beaucoup ces dernières années. Nul doute que de nombreux autres artistes partagent ce point de vue, sans parler des fans qui ont liké ce post Instagram plus d’un million six cent mille fois à l’heure où j’écris ces lignes.
J’ai aussi été touchée de voir avec quel soin, quels efforts d’écriture, le message en coréen avait été retranscrit en anglais.
Il n’y a aucun doute sur le fait que ce message ait été pris au sérieux.
Evidemment, ce qui me désole le plus, c’est que les idoles ne devraient pas avoir à s’excuser d’erreurs qui ne sont pas les leurs et dont ils sont les premières victimes.
Le côté humain de l’industrie de la K-Pop ne devrait pas être de la seule responsabilité de ceux qui se retrouvent sur scène, à devoir le défendre.
Une telle déclaration n’aurait même pas pu être publiée par une idole de K-Pop il y a dix ans. Mais les temps changent, et il serait grand temps de reconnaitre que les pros de la communication ne sont pas forcément dans les bureaux à faire tourner leurs modèles statistiques - ou à éplucher des rapports... - mais plutôt "sur le terrain", c’est-à-dire sur la scène.
Aujourd’hui, le succès de la K-Pop repose plus que jamais sur la capacité des artistes à jouer sur de l’émotionnel, un jeu extrêmement dangereux s’ils ne sont pas soutenus, à la fois par un management allant dans la même direction et par un public bienveillant.
Qu'ils soient régulièrement à bout de force n'est pas nouveau. Mais qu'ils le disent ouvertement est une petite révolution, et cela ne présage rien de bon.
Alors il va falloir se décider – et là je parle pour les fans. Souhaitons-nous continuer à utiliser la K-Pop comme un petit théatre de situation où le bashing est un divertissement du quotidien ? Ou souhaitons-nous pouvoir continuer à bénéficier de ce soutien, et de cette proximité avec ces jeunes artistes, parfois depuis l’autre bout du monde, qui consacrent toute leur vie à nous apporter ce qu'aucun autres ne savent faire ailleurs aujourd'hui ?
Tout ce que j’espère, c’est que chacun fera son examen de conscience. Sans quoi je ne parierais pas sur la survivance de la K-Pop dans les décennies à voir.
Parenthèse
08 avril 2022 - Le dernier titre de Big Bang me suit depuis trois jours... 😮
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(J’aurais bien appelé cet article « Untitled *», mais quelqu’un avait déjà pris l’idée !😁)
Sur Youtube, il y a un type un peu hors normes, un compositeur - qui s'appelle “Joony” - pour Jun Lee – et ça ne sonne pas terrible, ça rappelle le producteur de J-Pop, Johnny, mais il l’a peut-être fait exprès.
Apparemment, il se fiche de tout sauf de la musique, dans son appart-studio, avec les plaques de mousse isolante accrochées aux portes derrière lui, les valises encore à ses pieds, parce que, ces derniers mois, il voyageait...
Mais maintenant, voilà, regardez ! Sur son écran clignote la cinquantaine de pistes audio qu'il nous dévoile, le casque sur les oreilles, pour expliquer comment séquencer le son d'une flûte, comment il a transformé le bruit d'un coup de fusil pour qu'il nous coupe le souffle - en pleine poitrine - sans nous détruire les tympans, et puis en bas du tableau de couleurs où les pistes se déroulent, il supprime les basses de l'un des deux rugissants - il parle des sons comme s'ils étaient vivants - pour qu'ils ne se battent pas dans la fosse aux lions, dit-il, des graves, il y en a suffisamment. Il a créé une chaîne Youtube pour expliquer comment tout cela se fabrique, la musique pop et la K-pop. Il donne des cours de production musicale en ligne, c'est son métier, et sa compétence tient autant à la qualité de son oreille qu'à sa capacité à traduire en mots les sensations diffuses qui planent autour de lui.
Il n'y croyait plus. Les Rois sont de retour. Il explique... Seo Taiji, H.O.T... Big Bang. S'il ne fallait retenir d'une mémoire sélective que les premiers, les fondateurs, tout ce sur quoi nous sommes assis aujourd'hui...
Pour une première écoute, il lance la vidéo, crie comme un enfant sur le retour de T.O.P. (membre du groupe ayant mis fin à son contrat depuis peu). Pas eu trop le temps de suivre l'actualité, il le croyait perdu pour la cause, mais non, il est là ! La vidéo se déroule sur fond de musique mélancolique - la définition même de la mélancolie, à ne pas confondre avec les classiques ballades, ici on prend un degré de profondeur supplémentaire sous la ligne de flottaison - et Joony n'est pas le seul à rester sous le choc, le charme, l'incrédulité... et la tristesse. Est-ce une chanson d'adieu ?
Big Bang réapparaît pour la première fois depuis quatre ans, avec ce titre à double sens - Still Life - qui flanquerait le bourdon à n'importe qui - même aux plus ignares des non-fans (comme moi), qui les connais si mal et qui pourtant les suis du coin de l'œil, parce que, dans cet univers, on les a tous suivis du coin de l'œil, non ?
Et donc les non-fans, et les grands fans, et les plus ou moins fans, et les toujours fans, ne peuvent pas croire que le pilier de tout le battage de ces seize dernières années de k-pop, le centre de gravité de tout cet édifice de musique imbriquée, bâtie les titres les uns sur les autres, qui pendant des années s'est inspirée d'eux, les a copiés, imités, a tourné autour d'eux, personne ne veut admettre que ce cœur-boussole, repère et poteau, ce cœur vacille... et nous dit, avec délicatesse, et les mots les plus allégoriques qui soient, qu'il est fatigué...
Je n'ai jamais vu autant de vidéos de fans en larmes, et de commentaires sur une vidéo - un MV, pour parler Kpop comme il faut - en si peu de temps. Personne n’ignore le lot d’épreuves traversé ces dernières années.
Mais Joony affiche une bonne quarantaine d'années, alors il se tait seulement. Il a expliqué la similitude avec Abbey Road des Beatles - “vous connaissez les Beatles ?” Il récite le verset biblique, qu'il connaît bien, que l’on voit apparaître, inscrit dans le décor, sur un énorme rocher.
Et puis, tout comme la musique entre dans ses oreilles pour se transformer en mots, il n'est pas orateur, mais après un temps de silence, il se tourne un peu vers nous, sur sa chaise à roulettes, repose son casque et nous dit :
"D'habitude je n'écoute jamais les paroles des chansons. Je n'écoute que la musique, je suis comme ça… Mais cette fois j'ai écouté les paroles… C'est ça l'effet d'une chanson qui vous inspire, qui vous touche et qui vous parle, réellement… Big Bang a toujours fait ça. C'est un groupe qui n'a jamais eu peur de s'exprimer sincèrement, de se montrer vulnérable.
Et je pense vraiment, à la prochaine étape, que si la K-pop veut évoluer, elle doit devenir plus sincère, plus réelle. Les vies et les histoires de ces vies doivent être présentées au public tel qu'elles sont, sans chercher à les enjoliver. Big Bang sait faire ça, BTS sait faire ça, et je suis sûr que d'autres groupes essayent aussi de le faire. Et je souhaite vraiment que la K-pop devienne cette plateforme où les histoires vraies de personnes vraies pourraient être révélées. Pour que toutes les personnes qui écoutent de la K-pop, et surtout les jeunes, soient touchées, et inspirées, pour vivre mieux."
Puis il dit : “Voilà, j’en ai fini de prêcher…” et éteint la caméra.
Jun, je ne te connais pas, mais tes mots sonnent plus juste que tout ce que j'aurais pu en dire. Je te souhaite longue vie dans le métier, et que ton rêve, qui est aussi le mien, se réalise !
J’apprendrai plus tard que Jun Lee, ou plutôt Lee Jun, écrit des titres pour Monsta X, Super Junior, SF9…Sous ses dehors farfelus, il est reconnu dans le métier depuis bien longtemps.
Voici le verset de la Bible : « Tu as transformé mes pleurs en une danse de joie.
Tu m’as ôté mes habits de deuil pour me revêtir d’un habit de fête...» Psaume 30.11, dit Psaume de David, Ancien Testament.
Pas de fête ni de danse dans cette vidéo, mais peut-être un espoir de joie ?
Il y est question de Vivaldi – évidemment Les Quatre Saisons, représentées chacune par l’un des quatre membres du groupe – et Tchaïkovski - le Sacre du Printemps, peut-être ? (L’histoire d’un sacrifice rituel dans l’espoir d’un renouveau, si je ne m’abuse ?)
Mais aussi Shakespeare, Midsummer Night’s Dream – la scène finale ? « Ombres que nous sommes… ». « Si le spectacle vous a déplu, dites-vous que ce n’était qu’un mauvais rêve… ». Dans une des scènes, G-Dragon esquisse vaguement une révérence à un public imaginaire...
(Au passage, il n’y a que moi à qui la coupe de cheveux de Daesung rappelle celle de Jim Morrison ?)
Et enfin le titre, « Still Life », dont j’espère que les fans n’ignorent pas qu’il signifie « nature morte », figée, (still = immobile) hors du temps, comme cette horloge sans aiguilles dans la vidéo. Même s’il signifie aussi, bien sûr, mot à mot : « encore de la vie ».
J’affabule.
Big Bang a de toute façon refusé toute promotion autour de ce titre - dont il ne fait pas de doute qu’il sera tout de même sous peu un record de ventes ! - n’ayant aucune envie d’être assaillis par mille questions auxquelles ils n’ont pas envie de répondre. Mais ce n’est pas un jeu.
Car il y en a presque trop. Trop de références, car trop d’événements ces dernières années, et si l’humilité qui se dégage de cette chanson n’est pas une nouveauté venant de ses auteurs, sa profondeur nous accable, et je crois que c’est exactement de cet accablement qu’il s’agit.
Ce n’est pas que les Big Bang souhaitent pousser en dépression la moitié de leur public, mais plutôt qu’ils ne souhaitent pas mentir et dissimuler. Ces dernières années furent éprouvantes, ont remis en cause bon nombre de leurs repères, et si le temps reste figé aujourd’hui, avant de passer à autre chose, je crois tout simplement que c’est parce qu’ils ont souhaité cette pause de recueillement. Cet entre-deux.
Parce qu’il est certain qu’ils vont passer à autre chose, dieu sait quoi, mais quelque chose, et avant de repartir à la conquête des records de succès, ils nous demandent simplement de prendre ce temps de pause.
Je crois vraiment que la réponse est là. Il y a un deuil à faire de toute une époque, révolue, bénie sans doute aujourd’hui. Suivie de l’enchaînement de catastrophes qu’ils n’avaient pas vu arriver, même si l’on sait que certaines étaient déjà redoutées, mais pas à ce point-là : un membre en prison, un autre au bord du suicide, une maison de production en chute libre avec la démission de son fondateur historique, sur fond de scandale national... puis le silence forcé du service militaire, puis l’impossibilité, pour cause de crise mondiale, de remonter sur une scène pendant encore deux ans supplémentaires… Excusez du peu. On croirait presque voir revenir les années soixante-dix déjantées, pour un mauvais film américain. Mais dans le monde actuel de la musique coréenne, cela ne passe pas, et je ne suis même pas sûre que cela se soit déjà produit.
Moi qui ai écrit l’histoire d’un autre groupe à succès flingué en plein vol, resté traumatisé pendant des années de n’avoir pas pu exprimer convenablement ce qu’a été leur séparation, j’admire le geste, le défi au marketing, le refus de l’obligation de paraître sous des dehors triomphants pour le come back de l’année. Bref, la sincérité. L’histoire est effrayante, certes, mais réelle, incontournable, et indigeste.
Donc, c’est peut-être la fin de Big Bang, ou c’est peut-être juste une parenthèse. Mais je suis sûre que tout ce qu’ils demandent aujourd’hui, c’est que nous écoutions ce qu’ils nous disent, ici et maintenant, et que nous mettions de côté nos attentes - démesurées, il faut bien le dire.
Pour beaucoup, cette parenthèse à suspense va être un supplice… Mais je suis sûre qu’elle leur fait du bien en ce moment.
Pour toute référence à l’histoire et au rôle de Big Bang et G-Dragon dans la musique coréenne, pour le scandale du Burning Sun, pour l’arrestation de Seungri, et le départ de Yang Hyun-suk de la YG Entertainment, je vous laisse consulter internet.
*Untitled, 2014 - titre de G-Dragon, album Kwon Ji Yong, 2017
Merci à Lee Jun pour ses vidéos inspirantes: Joony - kpop producer reaction to Big Bang - Still Life
Ensemble... ou pas
11 mars 2022 - La Corée du Sud vient d'élire son nouveau président.
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Ce n’est pas que l’actualité ait manqué de piquant ces dernières semaines. Mais je m’étais dit que je ne ferais pas de politique sur ce blog. Enfin, tout de même...
La Corée du Sud a élu le 9 mars 2022 son nouveau président.
A ceux qui se posent la question – qui m’ont posé la question - voici un tableau, dont les chiffres semblent honnêtes, établi par Yonhap News.
Pour chaque tranche d’âge : 20 / 30 / 40 / 50 / 60 ans
- la première ligne représente la population masculine (nam 남),
- la deuxième la population féminine (yo여).
Le candidat en bleu est Lee Jae-Myung, du parti démocrate. Le rouge est le vainqueur, Yoon Suk-Yeol, représentant du parti du Pouvoir au peuple, nouveau président coréen.
L’impressionnant coude à coude s’est conclu avec 48.56% pour le nouveau président, contre 47.83% pour le candidat démocrate.
Le nouveau président Yoon Suk-Yeol fait partie des (nombreux..) candidats coréens ayant défendu l’anti-féminisme (si si) dans ses arguments de campagne.
D’où l’étrange graphique ci-dessous :
Je crois profondément qu’il est des sujets qu’il faut s’abstenir de juger de loin. Ce n’est pas parce que la Corée du Sud nous parait parfois toute proche qu’il nous est permis de discourir dans le vide de sa politique intérieure. Je vous laisse lire la presse.
Mais, depuis que je m’intéresse à ce pays, j’ai déjà vu à plusieurs reprises ses prises de positions influer sur l’imagerie des vidéos musicales coréennes.
Ainsi, avec la pandémie de ces deux dernières années, et la nécessaire cohésion dans l’effort de lutte contre le virus, on avait vu apparaître quelques vidéos à la symbolique militaire, avec drapeaux, rythmique de tambours, et remise à la mode des chorus à pleine voix pour les groupes masculins. C’était de bon ton, et tant mieux si cela a pu en aider certains à se sentir soutenus, soudés dans les difficultés.
Voir plus haut la vidéo de Oneus – Come back home – titre sorti en pleine pandémie en juillet 2020, pour un succès immédiat.
(N.B. Loin de moi l'idée de réduire cette vidéo, que j'aime beaucoup, à une symbolique simpliste. Je parle seulement des éléments utilisés.)
Cette fois, je suis curieuse de voir ce que ça va donner.
Quand je pense que j’ai entendu dire il y a à peine quelque semaines que la « nouvelle masculinité » des idoles de K-Pop s’était définie ces dernières années en réaction à la « masculinité toxique » de certains standards de dirigeants occidentaux… (Ce n’est pas moi qui le dit, c’est la professeure Hong Seok-Kyeong ; voir mon dernier dossier.)
Pour ceux qui ne le sauraient pas, la communauté K-Pop est composée de femmes à 90%.
On croise les doigts pour la suite des événements…
🤔🤔
14 mars 2022 : Le jeune Mingyu, du groupe Seventeen, est accusé de s’être affiché vêtu d’un pull rouge vif quelques jours avant l’élection. (!!)
J’apprends, non sans amusement, qu’afin d’éviter de dévoiler leurs intentions de vote, les coréens ont pris soin, ces derniers jours, de s’abstenir de porter des vêtements de couleur rouge, ou bleue, de manière à ne provoquer personne.
Mingyu est-il anti-féministe ? Les fans s’interrogent. L’obligera-t-on à se prononcer sur la raison de ce geste ?
On soupire... et je crains que ce ne soit que le début.
Le goût de l'Asie
24 janvier 2022 - Bientôt le Nouvel An lunaire !
Les supermarchés ont fait le plein.
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Vous l'avez reconnu ? C'est le dépliant publicitaire de chez... Picard ! Non, bien sûr, ce n'est pas nouveau, on y trouve du bibimpap depuis longtemps.
Mais cette fois, on est passé un cran au-dessus, et ça me fait bien plaisir :
Une enseigne française renommée vante des produits d'Asie en affichant une inscription en coréen !
Et non en caractères chinois ou japonais.
La vitesse à laquelle la Corée s'est fait connaître en France continue de m'étaper. Qui aurait dit il y a cinq ans qu'on trouverait un jour des cosmétiques coréens dans les Monoprix ?
Et la vision de Kai (Exo) en grand format pour Gucci dans les vitrines des opticiens, ça m'a fait un choc l'année dernière ! Dommage que si peu de personnes, en dehors des fans de K-pop, bien sûr, le reconnaissent.
Alors bien sûr, 아시아의 맛 ne signifie pas "Vivez l'Asie", mais ce n'est pas cela qui m'ennuie.
Parce que quelque chose m'ennuie tout de même dans ce dépliant, et il m'a fallu un moment pour mettre le doigt dessus :
Un bon vieux réflex de traductrice, sans doute : où est passée l'obligation, comme pour toute affiche publicitaire, d'insérer l'astérisque en fin d'une inscription en langue étrangère (non française) pour renvoyer en petits caractères, tout en bas, à la traduction française de l'inscription ? Ces caractères coréens, c'est juste pour le plaisir du graphisme ? Bon allez, j'en demande trop.
Patience.. ce n'est déjà pas mal du tout. On va y arriver !
En attendant, je m'en vais bientôt tester le kimchi de chez.. Carrefour (oui !) et puis, pour le plaisir, revoici l'affiche Gucci photographiée pas loin de chez moi :
Feel the Rythm!
15 décembre 2021 - Y a-t-il encore des retardataires qui auraient raté les vidéos de l’Office du Tourisme Coréen ?
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« Imagine Your Korea ». Tout un programme !
Mention spéciale pour celles de Seoul : « Feel the Rythm » Yeah!
Hasthag : Cheer Up the World – ça, c’est sûr !
Oui, encore une fois, imaginer et non découvrir… ce que l’on redoute toujours un peu dans l’exploitation du fantasme coréen. Mais chaque lieu, chaque image, sont minutieusement choisis. Et de nombreux morceaux chantés sont des adaptations de chants populaires traditionnels.
L’interminable et incroyable série a rassemblé trente millions de vues sur ses dernières vidéos !
Est-ce vraiment cela la Corée ? Peut-être pas, mais ce n’est pas si grave. Toute la subtilité réside dans le fait de ne pas vraiment essayer de le faire croire. Juste de rêver qu’effectivement, avec de telles richesses, il y aurait de quoi bâtir un paradis. Ces vidéos sont sans paroles. Elles ne parlent pas, elles évoquent.
Alors laissez-vous aller à ce grandiose hymne national mâtiné d’auto-parodie, où tous les personnages – au look d’inspiration Daft Punk et aux couleurs LMFAO – tous devenus acrobates, sportifs, danseurs - se rassemblent et se croisent au fil des excursions, sur les plages, dans la rue, sur le parvis des monuments historiques - sur les rythmes les plus étranges – oui, entre autres, du pansori ! - en tout cas remixés hip-hop avec une originalité indéniable – réunissant tous les âges et toutes les couleurs de peau.
Le hanbok cotoie le survêt’ Adidas et les Ray-Ban, on rappe dans les temples bouddhistes, en laissant de côté un instant tous les discours sur l’appropriation culturelle – pour ceux qui ont suivi ces récentes controverses coréennes : oui, ce sont bien des dreadlocks que j’ai aperçu dans l’une des vidéos – avec bonhommie, sur fonds de ciel limpide. Pas de pollution ? Et pas de masque non plus, hein, on en oublierait presque que les premières vidéos sont sorties en pleine période de fermeture des frontières, mais…
Ca fait du bien de rêver un peu, et après tout, si la Corée souhaite nous offrir du rêve, peut-être est-ce tout simplement parce qu’elle ne cesse jamais elle-même de rêver, de se réinventer, d’ambitionner…
Le marketing visiblement hors de prix est aussi subtil que puissant, et, sur le fond, l’énergie vitale, l’intelligence, et la créativité qui s’en dégagent, sont authentiques.
Une fois de plus : bravo !
Voici quelques liens vers mes préférées :
Feel the Rhythm of Korea - Seoul
Feel the Rythm of Korea - Mokpo
Feel the Rhythm of Korea - (City parody version) Mokpo
Feel the Rhythm of Korea – Jeonju
Feel the Rhythm of Korea - Daegu
Crédit images
Index : Exposition Centre Culturel Coréen, Paris - Photographie : Marianne Weller
Footer : Collections du Musée du Quai Branly, Paris - Photographie : Marianne Weller
La lettre de Seungkwan: matériel promotionnel Boo Seungkwan - compte Instragram pledis_boos 승관 SEUNGKWAN
Parenthèse : photo promotionnelle BIGBANG - Still Life - YG Entertainment - 2022
Le goût de l'Asie - Dépliant publicitaire magasins Picard - semaine du 17 janvier au 6 février / Gucci Eyewear campaign - NiNi and Kai, Exo - 2020
Autres photographies : Marianne Weller